Guérillas jardinières, rues ouvertes, marchés publics,
mobilier urbain, aménagement d’abris, terrasses, commerces éphémères, parklets,
nombre de villes en Amérique du nord sont de plus en plus assaillies de ces
interventions d’urbanisme tactique. Souvent associés à une forme d’acupuncture
urbaine, ces aménagements ou événements réalisés grâce à l’initiative de groupes
de citoyens et d’acteurs locaux expriment la volonté de la population de revendiquer
et de se réapproprier des espaces urbains problématiques, délaissés ou peu
accueillants.
La vision de Marco Casagrande, architecte et sociologue
finlandais s’inscrit dans ce courant de pensée qui fait la critique des
projets urbains d’envergure et prône une approche plus ponctuelle, à échelle
humaine. Selon Casagrande, ces micro interventions locales sont le résultat de la manipulation architecturale de l’intellect
collectif sensuel d’une ville.
Selon Jason Roberts, fondateur de l’organisme américain Better Bloc qui comprend aujourd’hui une
équipe de consultants pour la promotion de projets d’urbanisme tactique, il
sera dans un premier temps primordial, afin d’assurer la réalisation d’un
projet :
- De se manifester officiellement et aborder des groupes d’acteurs locaux qui pourront faire la différence (il mentionne que la majorité des gens qui se manifestent le font malheureusement plus souvent pour s’opposer à un projet plutôt que pour proposer des solutions)
- De concrétiser le projet en lui donnant un nom, une image, un logo
- To blackmail yourself ou de se faire du chantage à soi-même : fixer une date et annoncer le projet pour ne pas se laisser le choix d’aller jusqu’au bout
Ensuite, Roberts mentionne 4 éléments essentiels au succès d’une
intervention :
- Sécurité des lieux
- Accessibilité des lieux
- Endurance et persévérance dans la conduite du projet
- Des aménagements pour les 8 à 80 ans
Ces interventions seront souvent éphémères et réalisées avec
peu de moyens, en marge des pratiques formelles et du cadre réglementaire
municipal. Toutefois il arrive que la révélation du potentiel du lieu d’intervention
suscite l’intérêt des autorités municipales et autres acteurs qui souhaiterons
voir le projet se concrétiser de façon permanente ou récurrente, comme ce fut
le cas pour le projet de la High Line de New York. Véritables petits laboratoires, les projets d’urbanisme tactique s’avèrent
souvent des solutions temporaires à peu de coûts à des enjeux d’actualité et peuvent
ainsi permettre la concrétisation de projets par la démonstration du potentiel
réel d’un lieu, stratégie adoptée entre autres par l’organisme PPS (project for
public spaces). Les aménagements ou les événements proposés viennent moduler la
perception d’un espace et proposer de nouvelles formes d’usages et d’appropriation
pour ainsi le doter d’un certain attrait et le «remettre» à la population.